Oubli précieux, Antonis Fostiéris, Desmos/poésie, 2009
COMMUN ET INUTILE
Trois heures que j’essaie de dormir.
Chaleur du mois d’août
et, en plus, comme une idée
fixe, inutilement commune,
Dans mon oreille piaille
Un moustique.
Commun ? Inutile ? Je l’ignore.
Têtu - pour ne pas dire maniaque.
Que pouvais-je faire ?
Je l’ai chassé huit ou dix fois
Et finalement,
À ceux qui demandent
Et qui sonnent (malheur !
même la religion de la nature
avantage les effrontés)
J’ai décidé de me rendre. En espérant
qu’un don du sang volontaire m'assurerait
Quelques goutte de sommeil. Je me suis abandonné.
Il a atterri délicatement
Sur l’héliport du lobe. En se levant
La moitié de son poids au moins
Devait être de mon sang.
Bel échange :
Moi, le demi-moi d’un moustique !
Ça m’amusait presque. Mais comment dormir
Après ça. Car mon sang
A eu des ailes, pour la première fois,
Et il atteint en sifflant
Des hauteurs d’un vertige
Dont il avait sans doue manqué. Telle une plume,
Il partira à travers les grilles, au loin,
Pour aspirer toute la ville d’en haut
Avant l’aube.
Avant l’aube
Je l’avais tout à fait oublié. Je m’en suis souvenu
Par sa silhouette infime auprès du lit :
Alpiniste figé qui est resté
Sur la paroi enneigée d’un mur.
Ce n’est que ça, alors.
Tan de lutte, tant de sang,
Tant de tension,
Pour s’envoler un demi-mètre plus loin !
Inutile, effectivement, et bine commun.
Pas la moitié,
Mais tout moi, vous dis-je.
traduit par Clio Macroeidakos-Muller