Bois de dérive, Alain Bernaud, éditions Isolato, 2021

11/03/2022

Un matin, las de décompter l’impossible

d’enrouler sans fin le lasso de la résignation


il comprit soudain qu’il avait marché

sa vue durant tel un nuage

sur des cimes d’arbres ——


nomade que l’histoire interna 

dans la vastitude


Il détela son traîneau

déharnacha puis embrassa chacun de ses rennes


et regarda l’étendue

les boire un à un


Quand l’outre-horizon eut absorbé 

la dernière bête


il ne songeait plus

à ce que la vie n’avait pas été



Cabossées

de jeunes vies se consument par les deux bouts

hâtives de rejoindre

les ferrailles pourries

qui rougissent le sol mitraillé

par les chenilles des véhicules tous terrains


À l’écart, au bord du fleuve

une vieille femme accroupie

récure insondablement

sa marmite